Artxibak
2022/02/24
Vers une Europe de la défense ?
La crise ukrainienne interroge l‘avenir de l‘Union Européenne face à la Russie. Mikel Burzako, responsable des relations internationales d‘EAJ-PNB, réagissait au discours de M. Macron, sur son projet pour cette Union. Lisez l‘ensemble de l‘entretien, paru dans le Lema 231.
Mikel Burzako : « Nous partageons avec M. Macron l'idée d'une Europe plus souveraine »
Mikel Burzako est responsable des relations internationales, au sein de la direction nationale d’EAJ-PNB, l’Euzkadi Buru Batzar (EBB). Il réagit au discours réalisé par M. Emmanuel Macron, à Strasbourg, au Parlement européen, le 19 Janvier dernier, à l’occasion du lancement de la présidence française de l’Union Européenne, pour les 6 prochains mois. Que faut-il espérer de cette présidence ? L’Europe fédérale est-elle en voie de construction ? L’européisme de M. Macron est-il comparable à celui d’EAJ-PNB ?
Le président Macron a très rapidement évoqué la conférence sur l’avenir de l’Union Européenne. EAJ-PNB a publié une contribution pour une Europe réellement fédérale, avec des pouvoirs de « bas en haut », proche des citoyens. Que pensez-vous du positionnement de M. Macron ?
Je crois que M. Macron est un pro-européen solide et cohérent. La société française a été plus hésitante à ce sujet. Il faut se souvenir des référendums de Maastricht de 1992, avec 51% de oui et le rejet du traité constitutionnel en 2005. N'oublions pas que M. Macron a remporté les élections présidentielles de 2017 en brandissant le drapeau européen tandis que son principal rival, Mme Le Pen, prônait un référendum sur le Frexit. Nous partageons avec M. Macron l'idée d'une Europe plus souveraine, et co-protagoniste dans la géopolitique mondiale, une Europe garante des valeurs de paix, de sécurité, de liberté, de justice et de solidarité qui ont inspiré et imprégné la construction européenne, durant les 70 dernières années.
Cependant, l'approche territoriale nous sépare de M. Macron. Tant dans la reconnaissance de la diversité nationale et régionale que dans la projection de ces réalités dans les institutions européennes. Nous sommes clairement attachés à la proximité des institutions avec le citoyen, à une démocratie à plusieurs niveaux, de souverainetés partagées, à partir des fondements du principe de subsidiarité. D'autre part, pour nous la reconnaissance et le respect des identités nationales et régionales est une question de principe, démocratique et non négociable.
Les défis climatiques, numériques et de sécurité ont été au cœur de son discours. Il a été critiqué pour son manque d’ambition sur ces sujets. Qu’en pensez-vous ?
Je crois que M. Macron et la présidence française seront jugés sur l'exécution des engagements pris. M. Macron doit honorer son discours et mettre en œuvre des programmes pour faire avancer les objectifs définis. Dans le cas contraire, les attentes placées sur la Présidence française contribueraient à une nouvelle frustration.
Qu’espérez-vous de cette présidence française de l’Union Européenne ?
Je crois que la coïncidence de la Présidence française de l'UE avec les élections présidentielles et législatives et les travaux finaux de la Conférence sur l'avenir de l'Europe ne bénéficient ni à la Présidence française ni à l'intégration européenne. Je crois que l'effervescence électorale et la féroce bataille interne interpartis ne favorisent pas une gestion unitaire de la Présidence française. Cependant, je pense que M. Macron se considère comme le nouveau leader européen, le successeur de Mme Merkel, et fera tout pour que la présidence française soit un succès.
Je souhaiterais que le semestre de la Présidence française s’achève par un succès dans le contexte de la longue construction européenne mais, en dehors des hostilités électorales, les crises et les incertitudes qui nous menacent réduisent mes attentes quant à des résultats tangibles de cette présidence semestrielle.
Faut-il espérer l’émergence progressive d’une Europe de la Défense, face au désengagement de nos alliés américains en Europe et les menaces russe et chinoise ?
Oui, je crois que malgré la résistance des États, nous allons progresser vers une Europe de la sécurité et de la défense. Dans un monde en mutation où les menaces se multiplient, il est irresponsable d'agir uniquement à partir du soft-power. Je pense qu'il faut aller vers une autonomie stratégique européenne en la matière, même au risque d'établir une Europe à deux vitesses. Toujours en collaboration et en coordination avec l'Alliance atlantique qui défend les mêmes valeurs occidentales que notre civilisation européenne.
Ces dernières années, l’Union Européenne s’est dotée d’instruments fédéraux : Union bancaire renforcée, fonds de relance, … Un pouvoir européen autonome des Etats est-il inéluctable ?
Oui, je crois que nous avancerons vers une Europe plus souveraine, avec des institutions fédérales. Le nouveau monde des grandes puissances comme la Chine, les USA... et les blocs régionaux comme l'ALENA, l'ASEAN... nous le réclament. Nous devons progresser vers une Fédération européenne démocratique, construite de bas en haut, qui devienne un acteur mondial pour préserver les valeurs communautaires qui nous ont défini, au cours des dernières décennies.
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