Archives

15/04/2022

Aberri Eguna 2022

Manifeste de l'Aberri Eguna, par l'EBB, la direction nationale d'EAJ-PNB.

rss Ezagutzera eman
Aberri Eguna 2022

TELECHARGER LA PHOTO

Voilà maintenant 90 ans, le nationalisme basque exigeait démocratiquement la construction de la nation basque, la résurgence de sa patrie, Euskadi, en tant que projet spécifique et sujet politique. Cette revendication, réitérée chaque dimanche de Pâques, est devenue la libre expression de la volonté collective, une demande légitime de constitution d'une structure nationale issue de la décision souveraine de ses citoyens, conformément aux principes de la démocratie et des Droits de l'homme.

C'est le 90e anniversaire du premier « Aberri Eguna », de la revendication d'une patrie, Euskadi. Un an plus tard, en 1933, la devise de la Journée de la patrie s’intitulait « Euzkadi Europa ». Elle était liée au projet d’une Europe en devenir qui se voulait une nouvelle fédération de peuples, garante de la paix, du développement et de la justice sociale sur le Vieux Continent. Mais l'espoir d'harmonie et d'un avenir meilleur fut bientôt anéanti. La cruauté humaine, représentée par la guerre, a plongé, d'abord ce pays (guerre civile) et ensuite toute l'Europe (Seconde Guerre mondiale), dans la désolation, l'horreur et le désespoir.

Bien des années se sont écoulées depuis cette tragédie ; du soulèvement armé contre la légitimité démocratique ; du bombardement de populations civiles sans défense par des puissances militaires et connaissant de nouvelles formes d'horreur ; des crimes aveugles d'une dictature de la peur. Des décennies se sont écoulées depuis cette souffrance, cette répression, cette prostration collective, mais les blessures profondes qu'une guerre ne sont pas encore cicatrisées dans de nombreuses familles de ce pays. La violence a écourté leur destin, a enlevé des proches ou a conditionné leur propre vie. Aujourd'hui encore, 85 ans après la fin de la guerre au Pays Basque, des charniers continuent d'apparaître dans notre environnement avec les restes humains de gudaris et de miliciens qui ont succombé sans que leurs proches n’aient eu de nouvelles de leur sort. Il nous incombe, en tant qu'héritiers et héritières de ce sacrifice humain, de récupérer ses vestiges, de les identifier, de les transmettre à leurs proches et d'honorer leur mémoire en signe de reconnaissance et de réparation.

Nos aînés savaient que l'avenir de ce pays devait être lié à l'Europe. Et, dès la genèse du mouvement européen, ils ont participé à la constitution de ce rêve fédéral des peuples et des nations qui ont cherché à unir leurs forces pour bannir les erreurs de l'histoire passée et consolider une alliance de paix et de prospérité entre les nations. L'Europe a été, pendant des années, un gage de paix et un projet commun de coopération. Le rêve de l'Union est né après la dernière grande guerre et a été alimenté, d'abord par le besoin d'un marché commun. Puis, plus tard, par le désir d'établir un espace politique partagé. Il s'est imposé face à la chute du mur de Berlin, le dégel de la guerre froide et l'effondrement de la stratégie des blocs. Mais l'Union européenne, loin d'avancer dans sa volonté de renforcer un domaine supranational, a vu sa trajectoire freinée par une crise de croissance qui l'a une nouvelle fois déplacée dans le nouveau panorama géostratégique mondial, où des puissances émergentes comme la Chine ou La Russie rivalise ouvertement avec les États-Unis pour le leadership d’une nouvelle réalité internationale.

C'est dans ce cadre complexe d'un monde de plus en plus globalisé et interdépendant qu’une fois encore, la bêtise humaine a à nouveau provoqué le chaos d'une intervention militaire dont le risque certain, s'il se généralisait, pourrait avoir des conséquences dévastatrices pour l'Humanité. L'invasion de l'Ukraine par la Russie est une agression injustifiable. Elle constitue une violation du droit international. Celui-ci est fondé sur l'interdiction de l'usage de la force à l’encontre de la volonté populaire souveraine d'un peuple et l’occupation de son territoire. Cela suppose aussi une remise en cause manifeste de l'ordre international et de la volonté de paix et d'harmonie mondiale, menacée par l'usage des armes de destruction massive.

Comme nous l'avons récemment déclaré dans une déclaration publique, EAJ-PNB considère que cette invasion est totalement injustifiable. Les crimes de guerre commis y sont odieux. Les responsables devront comparaître devant la Cour pénale internationale et être jugés pour leurs actes de guerre ignominieux et crimes contre l'humanité. Cette attaque abominable qui affecte une population civile sans défense fuyant la terreur, nous rappelle une fois de plus que les valeurs de liberté, de démocratie, de prospérité et de justice sociale ne sont pas une conquête garantie. Nous devons les protéger, les promouvoir de façon permanente, avec l’ensemble des moyens légitimes et avec la plus grande détermination.

Dans la suite macabre de cadavres vus dans les télévisions du monde entier dans les rues de la ville de Bucha, des hommes et des femmes basques se sont sentis ukrainiens. Dans l'horreur d'aujourd'hui à Irpin, Kharkov, Marioupol ou Kiev, nous voyons les attentats à la bombe d'hier à Gernika, Durango, Otxandio... Dans le courage et l'intégrité de la résistance des dirigeants ukrainiens, nous nous souvenons de l'engagement et du leadership du Lehendakari Agirre et de cette génération d'hommes et de femmes basques qui ont tout sacrifié, y compris leur propre vie, pour la défense de la liberté et du Pays Basque. Dans les réfugiés arrivant en Pologne ou en Moldavie, nous retrouvons ces garçons et ces filles basques séparés de leurs parents et évacués sur des bateaux vers l'Angleterre, la France, la Belgique, l'Union soviétique... Dans les tentatives de discrédit, de manipulation et de désinformation, aujourd'hui utilisées en tant qu'éléments d'une nouvelle « guerre hybride » au service de l'agression, nous identifions également les mensonges qui accompagnaient autrefois le massacre de Gernika et l'improbable version officielle qui pendant des années a falsifié la destruction via une légende noire humiliante.

Durant plusieurs années, la revendication de l'Aberri Eguna a été liée à une situation d’exception. La pandémie mondiale de coronavirus a considérablement conditionné nos vies, non seulement en terme de comportement social mais aussi en terme de bien-être et de progrès. L'inactivité et l'isolement ont provoqué une rupture, une stagnation, dans notre vocation de croissance. Lorsque nous pensions que la crise provoquée par le virus s'inverserait, un nouveau choc, celui-là sous forme de guerre, nous a laissés avec des conséquences économiques et de développement, qu’il est encore trop tôt à évaluer, mais dont les premiers signes sont inquiétants. Bien qu'il n'y ait pas eu de récession, nous constatons un ralentissement de nos prévisions d'amélioration de notre qualité de vie. L'augmentation des prix causée d’abord par la crise énergétique et la pénurie de composants et de matières premières, vitaux pour les secteurs productifs de première rang, alourdit considérablement la facture économique. Elle devra être atténuée par le secteur public. Celui-ci devra encore une fois, mettre en place des propositions et des mesures favorables à la cohésion sociale et donner du muscle à notre tissu productif.

Nous assistons à une nouvelle ère politique caractérisée par la complexité et l'incertitude. Les changements de nature structurelle, dérivés du processus de mondialisation, les réajustements de l'ordre géopolitique et l'émergence de nouveaux projets remettent en question le système démocratique. Ils obligent le Pays Basque à établir un projet d'avenir pour construire la nation basque et ainsi répondre aux exigences d'une nouvelle ère. Une nouvelle ère et des défis qui ne peuvent être différés : le défi démographique, continuer à garantir l'égalité des chances et la cohésion sociale, la digitalisation de l'économie pour rester compétitif au niveau mondial, lutter contre le changement climatique en instaurant une transition écologique juste et garantir le développement de l'identité, de la culture et de la langue basque dans un contexte de plus en plus ouvert, diversifié et multiculturel. Nous aspirons à un avenir meilleur et non l’inverse ; un avenir ouvert sur le monde, sans nous réfugier dans les limites du passé ; un avenir caractérisé par la liberté, la sécurité, la prospérité, la durabilité et la diversité. L'Agenda 2030 doit constituer la feuille de route pour situer le Pays Basque, en Europe et dans le monde.

Aujourd'hui plus que jamais, nous souhaitons revendiquer le modèle basque et les valeurs qui ont donné aux femmes et aux hommes de ce pays la capacité et la solidité pour affronter l'avenir chaque fois que nous nous trouvions à un carrefour historique. Nous voulons et devons approfondir notre culture démocratique et la justice sociale basée sur le respect des droits fondamentaux, respecter la volonté de la majorité de la société basque, respecter ceux et celles  qui pensent différemment, fuir les opinions sectaires, nous engager à générer de la prospérité au service de la société, renforcer la communauté et la cohésion sociale pour que personne ne soit laissé pour compte, construire sur ce qui a déjà été construit sans prétendre recommencer l'histoire, apprendre et innover pour avancer et savoir semer pour que les générations futures puissent continuer à construire. La responsabilité sociale a guidé et doit guider l'avenir de ce pays. C'est notre phare.

La construction nationale, la feuille de route d'Euskadi, est directement liée à la capacité d'autonomie et à l'institutionnalisation progressive des droits nationaux du Pays Basque par le dialogue et la concertation. Ce processus doit être enraciné dans les valeurs démocratiques les plus profondes. Il sera complexe et graduel, mais il nécessitera l'implication de tout le pays à travers une gouvernance collaborative entre les institutions publiques, les partis politiques et la société basque. Ainsi, nous parviendrons à une autonomie basque solide, liée au projet européen et reconnue au niveau mondial.

En tant que « personnes en mouvement », nous avons toujours appris des hauts et des bas que nous avons dû surmonter, en cours de route. La mondialisation actuelle, avec la pandémie et la dépendance à des marchés lointains, nous a montré que la délocalisation de la production liée à la baisse des coûts peut entraîner une dépendance dans l'approvisionnement en composants et matières premières. Cela étrangle à un moment donné, notre capacité de production. D'où l'importance d'être maîtres de notre destin, d'avoir la capacité d'articuler à tout moment, de manière autonome, les mesures dont notre peuple a besoin. Sans tutelles ou intermédiaires qui entravent une action efficace.

Aujourd'hui, nous sommes bien plus une nation qu'il y a 40 ans. Beaucoup plus. Un peuple bien plus conscient de lui-même. Mais la société et le monde qui nous entourent sont différents. Les aspirations personnelles des citoyens ne sont plus les mêmes qu'il y a quelques décennies. Et demain sera différent d'aujourd'hui. De la même manière, les structures politiques internationales s'adaptent en permanence. Personne ne peut le nier. Le monde change, et Euskadi avec lui. Il ne fait aucun doute que nous sommes confrontés à un changement de cycle dans les relations sociales et politiques dans le monde. Et, à plus forte raison, nous devons accepter l'incertitude après la guerre provoquée par la Russie dans les limites orientales de notre Union européenne. Il est logique que nous nous interrogions sur le chemin qui doit guider nos pas dans cet environnement dans lequel nous évoluons.

Nous sommes clairs sur la destination finale à atteindre : notre peuple pleinement maître de son destin, à égalité avec le reste des peuples d'Europe et du monde. Cela dit, il est temps de s'interroger sur les défis auxquels le nationalisme basque devra faire face pour naviguer dans cette houle orageuse qui nous attend. Il est temps, une fois de plus, d'écouter les citoyens. Répondre à leurs préoccupations, leurs perceptions, leurs désirs. Écoutez pour continuer à construire ensemble. 'Entzunez Eraiki'.

Nous luttons pour la liberté d'Euskadi. La question est de déterminer comment nous allons continuer à le faire en ces temps complexes. Et la réponse est toujours du côté de la volonté majoritaire de ce Peuple. Deux prémisses fondamentales doivent soutenir notre action : l'unité et la confiance. Si nous restons uni/es, nous saurons résister et aller de l'avant dans l’adversité, aussi compliquée soit-elle. Et précisément, grâce à cette unité, nous saurons transmettre à la société basque, la confiance nécessaire pour avancer dans la construction nationale.

Ce même sentiment qui nous préoccupe aujourd'hui a été soulevé, de façon bien plus dramatique, il y a 85 ans. Le Lehendakari Agirre a résumé cette idée le 30 juin 1937 dans le soi-disant « Manifeste de Trucíos », lors du retrait de l'armée basque, à la suite de l'occupation de la Biscaye par les troupes rebelles. « Le territoire a été conquis ; l'âme du peuple basque, non ; elle ne le sera jamais." L'important était, est et restera l'âme du peuple basque, son sens communautaire, son auto-identification, sa volonté d'être libre.

Nous sommes un peuple solidaire. Nous souffrons avec ceux qui souffrent. Nous résistons avec les résistants. Nous espérons avec ceux et celles qui ne perdent jamais espoir. Nous dénonçons la violence, d'où qu'elle vienne. Nous défendons les Droits de l'Homme, le droit à la vie, à la liberté, à la décision souveraine des peuples. Aujourd'hui, comme hier, nous disons "Non à la guerre". "Non" à l'action criminelle de ceux qui, par la force, cherchent à modifier les limites de la coexistence et l'espérance de vie de milliers d'innocents.

Aujourd'hui, en cet Aberri Eguna, Journée de la Patrie Basque, nous, nationalistes basques, revendiquons le droit de tous les peuples à défendre librement leur avenir. L'avenir d'Euskadi, de l'Ukraine, du Sahara Occidental... Et dans cet effort, nous appelons l’ensemble des nationalistes d'Araba, Bizkaia, Gipuzkoa, Nafarroa, Lapurdi, Behe ​​​​Nafarroa et Xiberoa, ainsi que ceux et celles réparti/es à travers le monde et regroupé/es dans les Euskal Etxeak, à célébrer notre jour, le Jour de la Patrie Basque, l'Aberri Eguna.

La période que nous avons eu à vivre nous oblige à agréger des volontés de faire. Nous exigeons la paix dans le monde, la justice et la défense des Droits de l'Homme. Nous exigeons la cessation de la guerre causée par l'invasion russe en Ukraine et les actions criminelles perpétrées contre la population civile sans défense. Nous revendiquons l'unité des démocraties occidentales et la nécessité de renforcer l'Union européenne. Elle est l’unique référence d'un projet commun dans lequel le Pays Basque a confiance, afin de partager son avenir, dans la paix et la liberté.

Enfin, nous renouvelons notre appel annuel aux citoyens d'Euskadi, encourageant les hommes et les femmes basques à revendiquer notre droit à la paix et à la liberté, en portant dans la rue, le symbole commun qui nous identifie, l'ikurriña. Ce geste sans équivoque représente notre volonté de construire un nouveau pays, une nouvelle société dans laquelle nous aurons tous la capacité de nous exprimer et de décider, protégés par le respect des Droits de l'homme. De même, nous invitons les citoyens basques à participer aux actes convoqués ici et là, dans le respect, pour exprimer leur appartenance à la Nation basque et revendiquer leur droit, par la libre adhésion de chacun et chacune, à décider démocratiquement de leur avenir.

C'est ainsi que nous le proclamons, en cette Journée de la Patrie Basque, en 2022. Une Patrie forte, libre, prospère et pacifique.

Gora Euskadi Askatuta!

Euskadi, le 17 avril 2022

EUZKADI BURU BATZAR

EUZKO ALDERDI JELTZALEA-PARTI NATIONALISTE BASQUE

 

En photo : deux dirigeants de notre direction nationale, hier, à Gernika : Mireia Zarate, secrétaire et Joseba Aurrekoetxea.

 

 

 

 

 

Manifeste pour les élections de 2024 du Parti Démocrate Européen
PDE-EDP